Fille du célèbre musicien Salif Keita, Nantenin est triple championne du monde ainsi que médaillée d’or aux Jeux paralympiques de Rio en 2016. Née albinos avec une importante déficience visuelle, cette figure du para athlétisme français s’engage aussi pour la cause des enfants atteints de cette maladie. Portrait d’une ambassadrice qui fait de sa différence une force.
Par Evan Glomot
Athlète paralympique, défenseuse des droits des personnes atteintes d’albinisme et fille du célèbre musicien malien Salif Keita (également touché par la maladie génétiquement transmissible), la vie de Nantenin n’a jamais été de tout repos. Elle naît au Mali en 1985, avant d'atterrir en France deux ans plus tard. “Mon père ayant grandi au Mali, il n’a pas voulu que j’aie les mêmes difficultés que lui, que ce soit sur le plan de la société ou de l’éducation. Avec une déficience visuelle, on n’apprend pas de la même façon” déclare-t-elle au journal Le Monde.
Elle découvre l’athlétisme très jeune lors d’une compétition pour déficients visuels. Elle se passionne pour ce sport et commence rapidement les compétitions. En 2002, elle obtient son premier titre international et devient vice-championne du monde du 400m. Mais la franco-malienne ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. C’est en 2006, aux mondiaux d’Assen aux Pays-Bas, qu’elle prend véritablement son envol en étant sacrée double championne du monde du 200m et 400m. Pas étonnant pour celle qui a déclaré au début de sa carrière : “L’athlétisme est une passion mais je pense aimer plus la victoire que le sport en lui-même”. Les Jeux paralympiques viendront confirmer ses propos.
Après le bronze et l’argent décroché à Pékin en 2008, respectivement sur 400m et 200m, puis à nouveau une troisième place à Londres en 2012, cette fois sur 100m, Nanto (comme la surnomme ses proches) décroche le graal quatre ans plus tard à Rio. Elle se remémore les longues secondes d’attente dans la chaleur du stade olympique avant l'explosion de joie :"J’avais peur d’avoir été dépassée sur ma droite par la Portugaise en bout de ligne. En début de course, mon acuité visuelle est comprise entre 0,7 et 0,5 sur 10. Je parviens à deviner les lignes, mais quand je suis dans le rouge, je ne vois plus rien.” Une consécration bienvenue car Nantenin échouera au pied du podium aux Jeux de Tokyo en 2021.
Assistante en Ressources humaines à la vie civile, elle apporte également son aide aux enfants albinos, notamment via la fondation qu'elle a créée avec son père (Salif Keita Pour Les Albinos). A travers cette association, elle multiplie les actions sur le plan de la santé et de l’éducation. Un besoin de s’engager qui prend sa source dans son enfance difficile: "Quand vous êtes albinos, tous les regards sont portés sur vous, c’est très pesant, témoigne-t-elle au Monde. J’ai connu moqueries et mépris. Comme j’étais différente, il y avait forcément quelque chose qui clochait chez moi… J’avais peu d’amis, certains enfants refusaient de me parler, ils me donnaient des surnoms pas très sympathiques".
Son objectif est de faire stopper, ou du moins diminuer, les discriminations et railleries contre les albinos. Nantenin ne manque jamais une occasion de défendre sa cause, surtout lors d'événements médiatiques. En effet, le 13 septembre 2017, jour où Paris s’est vu attribuer l’obtention des Jeux 2024, son discours lors de la session du comité olympique international a marqué les esprits.
La championne a profité de l’occasion pour adresser un message fort et rassembleur. “La différence a toujours fait partie de ma vie, avait-elle lancé à l’assemblée. Je suis albinos et malvoyante. Mais aux Jeux, je suis une athlète. Parce qu’aux Jeux, il y a autant de pays que de handicaps. Aux Jeux, la différence à toute sa place. Aux Jeux, la différence est une force.” Avec de tels discours et d’aussi beaux représentants, l’avenir du paralympisme est assurément entre de bonnes mains.
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